Gilles Cohen Solal et Héloïse d’Ormesson ont monté leur propre maison d’éditions en octobre 2004 et leurs premiers livres sont apparus dans les librairies en mars 2005.
Oui HEO est la fille de... mais même si j'imagine qu'elle a été inspirée par le côté livresque de son père elle n'a pas construit cette maison sur son nom.
La preuve, Jean n'a pas été publié avant que la maison ne commence à bien fonctionner.
En même temps j'en profite pour envoyer un gros bisous à M.d'Ormesson (oui je sais rien à voir avec l'interview mais admettez que son regard est quand même des plus charmeurs!!!)
Bon revenons à nos moutons sinon Gilles va s'enfuir avant la première question!:)
Donc depuis de nombreux titres fleurissent, vous avez déjà d'ailleurs pu voir plusieurs de leurs ouvrages: "Elle s'appelait Sarah" de Tatiana de Rosnay, "José" de Richard Andrieux présentés sur mon Blog car j'avoue que leur sensibilité me parle... Je vais me faire une bibliothèque spéciale EHO moi!;)
Du coup je savoure les titres et leurs auteurs et je les interviewe avec un enthousiasme de gamine que je suis!:)
-GCS: Avant d'être co-éditeur, on dit comme ça?:)
Tu faisais quoi? Je sais que tu travaillais déjà dans cette branche et justement tu peux nous décrire ton parcours?
Non, on ne dit pas comme ça! Coéditeur c'est quand on se met à deux éditeurs pour publier un livre, nous sommes Héloïse et moi co-fondateurs et éditeur chacun à part entière.
Ok je note !:)
J'ai rencontré Héloïse chez Robert Laffont en 1987.
J'ai eu un coup de foudre pour elle et lui ai proposé que nous fassions notre vie ensemble.
Elle m'a répondu:" tu es beaucoup trop fou, il ne se passera jamais rien entre nous!"
Tout le monde peut donc constater que les femmes n'ont pas de suite dans les idées! C'est une histoire absolument vraie!!!
Je travaillais chez R.L comme représentant Paris et après j'ai crée une petite boîte qui s'est, entre autre, occupée d'un certain nombre d'éditeurs dont les Éditions Albert-René (Goscinny-Uderzo) et voilà pour mon parcours dans le métier.
-Comment peut-on avoir eu l'envie de développer une maison d'éditions avec une telle concurrence?
Assez simplement.
Il suffit juste de se dire que la liberté est à ce prix! À partir de là, entre faire ce que l'on veut en prenant des risques et ne pas faire ce que l'on veut en prenant le risque d'être viré par quelqu'un le choix est assez vite vu, il me semble...
-La question que tout le monde se pose... Et qui restera toujours une énigme je pense!:)
Un livre reçu par la poste, sans aucun lien avec personne dans une maison d'éditions classique... Humm a t-il une chance d'être lu? Retenu? Je sais j'y crois plus, mais j'ai hâte de découvrir ta réponse!:)
Un livre qui arrive par la poste a toutes les chances d'être publié... si il est bon!
Et c'est très rarement le cas. Le problème ce n'est pas l'anonymat relatif ou l'absence de notoriété, le problème c'est l'indigence et la prétention de la majorité de ce que les éditeurs reçoivent. En tout cas, nous avons publié des livres arrivés par la poste (ou déposés à la maison d'édition); ce n'est pas la majorité de notre production mais c'est arrivé
-Tu publies environ 20 livres 20 livres
Nous publions
C'est beaucoup pour Héloïse, et pas assez pour moi! Le problème n'est pas le nombre des publications, c'est leur qualité!
Il n'y a jamais assez de bons livres et toujours trop de mauvais...La médiatisation est un phénomène complexe lié au texte, à l'auteur et la publicité que nous faisons.
Ce n'est jamais gagné, et de toute façon si , dans un cas comme le nôtre, le livre n'est pas soutenu par les libraires il n'a que peu de chance d'avoir une vie agréable...
-En deux années d'existence, quel est ton premier bilan?
Mon premier bilan était déficitaire, très largement...Et le second est bénéficiaire ce qui relève du miracle!
Toute plaisanterie mise à part le premier bilan que l'on peut tirer de ces trois années de publication est que c'est très difficile mais extraordinairement passionnant!
-Comment sais-tu qu'un livre sera aimé ou non? Coup de poker, enjeu périlleux ou une réelle certitude?
Je ne sais jamais! Héloïse est beaucoup plus douée que moi pour cela...!
C'est à chaque fois un coup de poker, toujours un enjeu plus ou moins périlleux et jamais une réelle certitude!
-Pour toi une bonne vente de livres c'est combien d'exemplaires, à quel nombre peut-on dire: ok on gagne de l'argent?
Une bonne vente de livres ne peut pas se définir par le seul chiffre des ventes en librairies.
Il y a aussi les cessions de droits, en poche, en club, au cinéma. On ne peut pas dire : "je gagne de l'argent à partir de 5,000 ex"; tout dépend du prix que l'on a payé le livre, de la traduction ou pas, de l'investissement promotionnel...
Il y a des livres avec lesquels on gagne de l'argent à 3,000 ex et d'autres avec lesquels on en perd à 12,000 ex.
-Les contacts avec les libraires se passent comment? Je dis pas ça parce que moi pauvre petit auteure locale je me fais toiser lorsque je quémande une séance de dédicaces malgré les appels de mon attachée de presse hein? Mais juste pour connaître la recette!! Attaché de presse efficace, c'est le nom de la maison qui prime? Un libraire propose de lui -même ou bien est ce aussi à vous de les solliciter?
Les contacts avec les libraires se passent bien mais nous n'en n'avons pas assez et c'est notre responsabilité! Nous devrions aller les voir plus souvent, parler d'avantage avec eux et essayer de nouer des relations plus proches.
Aujourd'hui un éditeur comme nous qui ne fait pas cela n'a que peu de chances de vraiment réussir.
Les libraires représentent plus de 80% de notre chiffre d'affaire, il faut s'en occuper!
-Vous êtes deux à avoir fondé cette maison, deux à la diriger et deux euh deux quoi?!:) pas difficile de parler du travail à la maison? Bah vi depuis votre rencontre en 1987 vous ne parlez quand même pas que de bouquins??;)
Depuis 1987 nous nous connaissons, mais nous ne vivons ensemble que depuis 5 ans!
Si c'est difficile mais je crois que nous aimons passionnément ce que nous faisons et que nous nous aimons aussi...pour le reste nos copains nous appellent "Taylor et Burton", cela donne une idée du nombre d'engueulades hebdomadaires!
Non, nous ne parlons pas que de bouquins mais nous avons beaucoup de mal à parler d'autre chose que de la boîte, du métier, des auteurs et de tout ce qui va avec...mais il y une chose importante à savoir éditeur ce n'est pas un métier, c'est un mode de vie !
-Ton côté accessible et naturel me semble assez incroyable dans un monde où la plupart des gens se cachent derrière leur nom... Du coup je me demande... Toi qui aime bloguer... Tu as d'autres passions que de lire et de mettre en valeur des livres coups de coeur?
Lorsque l'on entend certains éditeurs aujourd'hui on a l'impression qu'ils sont tous agrégés de lettres classiques, qu'ils ont donc été normaliens et qu'ils détiennent la vérité sur tout mais que surtout ils détiennent la vérité!
C'est d'une absurdité complète. Les gens ne se cachent pas derrière leur nom, ils se cachent derrière leur statut ce qui est bien pire à mes yeux!
Remarque il y en a qui font les deux: nom ET statut, je ne cite personne ils se reconnaîtront. Oui j'ai d'autres passions que lire et parler de mes livres coups de coeur: Héloïse et mes enfants.
Je crois que mes passions se limitent à eux.
-Que penses-tu des maisons d'éditions à compte d'éditeur qui propose le téléchargement en pdf ou l'achat de leurs livres?
Rien, je n'ai pas d'avis sur tout.
Cela étant si je sais ce qu'est le compte d'auteur je ne sais pas ce qu'est le compte d'éditeur....
-Le compte d'auteur ça t'inspire quoi?
Il y a des "auteurs" qui ne méritent pas mieux...Parfois il faut assumer simultanément son ambition et son absence de talent, le compte d'auteur est un bon moyen pour ça...
-Que penses-tu du négriat littéraire?
Vieux comme le monde, je pense qu'il y a certains auteurs dont il vaut mieux qu'ils aient des nègres mais ils devraient mieux les choisir!
-C'est quoi l'avenir pour les auteurs? On dit qu'il y a plus de gens qui écrivent qui ne lisent alors ne crois-tu pas que demain il n'y aura plus que des écrivains?
Je n'ai aucune inquiétude à ce sujet!
-Penses-tu qu'en France les livres soient moins bons qu'à l'étranger?
Absolument pas!
Il ne faut pas oublier que les livres étrangers que nous avons en France sont une infime sélection de ce qui se publie à l'étranger, il est donc normal d'avoir cette impression mais ils ont la même à l'étranger concernant les livres français.
-Comment peut-on donner le goût de la lecture aux enfants d'après toi?
En leur interdisant la télévision!
-La vague des bouquins politiques... Tu connais les chiffres de vente? Est-ce que cela intéresse tant que ça les lecteurs?
Chaque année électorale il y a une vague de ce genre de livres...on les oublie vite!
Les chiffres sont très importants pour certains et mauvais pour la plupart... pour connaître les chiffres il suffit d'aller sur EDISTAT, ça se trouve facilement
-Tu as bien du être alerté de la censure dont "la lettrine" a fait l'objet il y a peu, quelle est ta position, non pas sur le fait que l'hébergeur suspende le blog (après tout il n'a peut-être pas eu le choix), mais sur le côté agent littéraire? Chez EHO des agents sont-ils venus pour tenter de placer des manuscrits? Comment cela se passe?
Oui nous achetons des livres à des agents, ou leur confions des livres à vendre. J'aime bien les agents et spécialement le plus détesté d'entre eux Andrew Wylie.
-Tu nous parles de ton actu? Le prix Clara ou autre?
Mon actu c'est le livre de mon ami Lionel Froissart qui s'appelle "les Boxeurs finissent mal... en général".
Un livre exceptionnel non pas sur la boxe mais sur l'humanité qui l'entoure et le destin hors du commun de douze boxeurs avec lesquels il écrit, je crois, LE roman de la boxe. Héloïse qui n'aime pas la boxe ne l'a pas lâché...excellent signe!
-Si tu devais changer radicalement de métier, tu ferais quoi?
J'irais dans le désert du Néguev, au sud d'Israël, dans un kibboutz.
-Quel est ton livre favori?
Mon livre favori c'est impossible à dire mais je pense qu'en citant tout Victor Hugo je ne me trompe pas!
-Ton chanteur préféré?
Probablement: Jacques Brel
-Ta chanson préférée?
My way.
-Et sinon la question finale habituelle: tu es un homme heureux dans la vie? Il te reste encore des rêves à accomplir?
Je suis plutôt très heureux, avec des hauts et des bas; comme tout le monde je crois.
Mais j'ai énormément de chance et ça j'en suis parfaitement conscient comme disait mon père spirituel René Goscinny.
"Un homme auquel il ne reste plus de rêves à accomplir est un homme mort" Gilles Cohen-Solal (comme disait Sacha Guitry j'aime bien me citer cela ajoute du sel à ma conversation!)
Merci beaucoup!! La prochaine fois je m'invite!;)
HELOISE D'ORMESSON EDITIONS
87, boulevard Saint-Michel
75005 Paris
FRANCE
Tél : +33 (0)1 56 81 30 70
Fax : +33 (0)1 43 26 19 68
http://www.editions-heloisedormesson.com
La deuxième photo est celle de Lucia Etxebarria et de notre amie commune Alessina Putin...
Je trouve que j'ai l'air un peu émèché mais cela devait être le cas donc la photo n'est pas si mauvaise!:-)
Merci pour les rectifications, je dois dire que rien n'a été touché à mes réponses et que ça me fait grand plaisir.
À très bientôt donc pour l'interview...d'Héloïse?!
Gilles
Rédigé par : Gillou le Fou | 17 octobre 2007 à 18:21
J'aimerais beaucoup!;)
Je passe par toi?:)
Pour les photos, c'est clair que cette soirée avait l'air festive!!!:)
Rédigé par : Elisabeth Robert | 17 octobre 2007 à 18:38
Merci pour les condoléances Elisabeth, je te tiens au courant.
Et bravo pour cette belle itw ! (j'aimerais bien pouvoir te dire tout le bien que je pense d'eux, mais ça ferait trop, non?). Mais si tu veux créer le fanclub EHO je veux bien en faire partie ! Secretaire en charge des libraires vendéens, ça te va?
à bientôt,
Rédigé par : ecaterina | 17 octobre 2007 à 19:03
A questions directes, réponses directes, bravo pour cette interview toujours aussi bien menée et intéressante :-)
Rédigé par : Marie-Laure | 17 octobre 2007 à 19:06
Un monsieur très intéressant et sûrement très sympathique. Tu as de belles amitiés Elisabeth !
Rédigé par : Sarvane | 17 octobre 2007 à 20:36
Houlala !!! Une maison d'édition peut-être florissante (en tout cas réputée) avec 20 livres par an ? Ça me rassure.
Moi qui ai débuté il y a 2 mois, j'avoue que cette interview m'a conforté. j'ai sans doute une stratégie un peu différente mais je m'aperçois qu'il est possible de s'imposer dans l'édition pour peu que l'on sache utiliser ses propres armes.
Bravo babeth pour cette interview, et tous mes voeux de réussite à M. Cohen-Solal.
Petit détail important : Ma petite copine rêve, elle aussi, de se retirer dans le désert du Néguev, au sud d'Israël, dans un kibboutz. Mais si cela devait arriver, ce serait avec moi ... désolé !
Rédigé par : Lionel Videlo - NICOLION Editions | 18 octobre 2007 à 00:25
Ils m'ont l'air sincères chez ELO. Interview intéressante. Merci pour ce petit tour d'horizon.
Rédigé par : Nath | 18 octobre 2007 à 08:10
Très bonne interview de GCS, il apparaît tel que je le voyais, simple et nature, même s'il ne m'a pas encore répondu !. Comme tu le dis, cela changes des "m'as-tu vu guindé" habituellement rencontrés dans l'édition. Heureusement qu'il en reste ! D'autre part, tu as posé les bonnes questions concernant le parcours des manuscrits. Bien du monde se les poses et, le sujet fera encore l'objet de bien des débats. GCS souligne la fatuité de bien des "aspirants écrivains", je suis bien d'accord, il suffit de lire leurs blogs pour s'en rendre compte. C'est souvent navrant de constater le manque de modestie de ceux-ci.
Rédigé par : Jerome | 18 octobre 2007 à 08:35
Super interview, bravo !
Rédigé par : Anne-Sophie | 18 octobre 2007 à 13:33
J'ai aussi trouvé les réponses de Gilles très sincéres! Merci à tous!:)
Rédigé par : Elisabeth Robert | 20 octobre 2007 à 11:37